L'expérience du dineur solitaire, le marché d'été, Rino. Enjoy.
J'ai l'esprit encore un peu embué par le verre de vin blanc bio dégusté chez les ritals que je vous écris déjà l'article. Car la saveur y perdrait, car la spontanéité du goût doit transparaitre dans l'écrit.
Mon compatriote des essais bistronomiques m'ayant fait faux bon pour d'absurdes raisons (comment ça écrire un mémoire de M2 en droit dans l'heure qui vient est une excuse recevable?), me voilà, hardie et assurée flippée grave, attablée en solo dans cette petite échope du 11e arrondissement. Table du fond, baie vitrée, petite cour, soleil qui caresse. Feeling good. T'aurais pas dû m'abandonner ju, t'aurais pas dû:)
Ceci dit, j'ai dégoté deux compagnons de secours,et de choix: Vivre Paris pour ma lecture, mon fidèle APN pour la vôtre, future.
J'ai moins de scrupules à régler dix fois pour joujou, et puis je peux bouquiner la page mode tranquille,na.
Bon, je suis civilisée tout de même, alors j'observe, je souris, j'interroge. On n'est pas au café du coin non plus, on est là pour en prendre plein les papilles merde!
Carte brève, directe, lets go.
Velouté de haricots blancs, brandade, chou pointu, salicornes, oeufs de poisson. Mortel. Doux, tiède, croquant, frais, savoureux. Un baiser. Mortel, donc. On voudrait juste y revenir dix fois, qui se lasse d'être embrassé, qui?
Carrelet meunière (mais pas meunière, finalement. Dommage), pommes de terre nouvelles, mini fenouils, arroche, pistou d'herbes. Pas mal. Equilibré, bien cuit, bien assaisonné. Mais mais mais, on attend le petit plus, l'accroche qui laisse le souvenir au bout de la langue.
Financier, fraises, glace au lait. Simple, enfantin, très bon. (déjà) classique de la maison.
Je suis conquise, pas pleinement surprise, certes, mais d'aucuns avanceront mon niveau d'exigence frisant parfois l'improbabilité.
Et puis cette petite entrée, rien qu'elle, m'aura d'emblée décidée à revenir, c'est pour dire!
Mais, que vois-je, à la table voisine, des assiettes innattendues, des mets secrets, des "menu en 4 plats" !!? Il se joue ici quelque mélodie en sourdine, un truc d'initiés...Mince, je suis jalouse. Alors certes, voilà bien le jeu des nouveaux cuistos, être libre, décomplexé, n'en faire qu'à sa tête, et Dieu sait comme j'approuve! Sauf que, là, on entre sur le terrain de la frustration, de l'inéquité, et, j'avoue, c'est un peu douloureux. Pourquoi la proposition du rouget petit pois à ma gauche, pourquoi l'arrivée de la demi-langoustine en guise de patience à ma droite?
Oui oui je sais c'est mal de regarder dans l'assiette du voisin.
Ma punition? la voilà sur l'addition: dessert offert! Rouge comme leurs fraises, ma honte.
Et si finalement, chez Rino, tout le monde avait droit à son privilège, parce que chaque être de ce petit monde mérite la générosité et le bon goût de Giovanni?
De retour so soon chez les jolis italiens (ça ne gache rien hein), pour venir tâter de leur carte béton du soir, ou encore savourer le bonheur d'un déjeuner ensoleillé, accompagnée. J'ai déjà ma petite idée concernant la belle âme qui saura partager cet instant de nouvelle cuisine:)
Rino chez Giovanni Passerini, avec Simone en second, et un gentil serveur aux superbes binocles
46 rue Trousseau
75011 Paris
Tel 01 48 06 95 85
ps: si vous êtes veinarde, Romain D. ne s'attablera pas trop loin de vous...j'dis ça, j'dis rien moi...
ps 2: prenez quelques minutes d'avance, allez balader dans les allées du marché d'Alligre, goutez les abrictos et les fraises, observez-les jouer à la marchande...C'est bon, vous êtes prêts, à table!